email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

BERLINALE 2023 Panorama

Critique : After

par 

- BERLINALE 2023 : Immersion totale dans une fête techno underground pour un premier long métrage d’Anthony Lapia hyper énergique et néanmoins teinté d’une mélancolie générationnelle

Critique : After
Louise Chevillotte dans After

Il fait nuit, les murs sont couverts de graffitis, des flaques s’accumulent dans un parking souterrain désaffecté et au loin résonne un beat dont la caméra se rapproche jusqu’à ce qu’il devienne intensément sonore et que s’ouvre aux regards le lieu souterrain d’une fête techno effrénée. Pendant plus de six minutes, sur le dancefloor, une foule extatique d’une soixantaine de visages filmés en gros plan se déhanche en une irrésistible vague kaléidoscopique, dans une proximité physique maximale, au paroxysme de la puissance du son.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Ainsi démarre pied au plancher After [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Anthony Lapia
fiche film
]
, le premier long métrage du Français Anthony Lapia, présenté au Panorama de la 73e Berlinale, un film minimaliste et radical propulsant le spectateur en position de participant à cette euphorie, à cette ivresse de fêtards aux corps et aux esprits débridés sous influence chimique, au cœur d’une communauté échangeant fugacement au bar et au fumoir, s’évadant dans un espace-temps condensé en un lieu et une nuit, dans un désir fiévreux de se libérer des carcans du monde extérieur (les barrières des classes sociales et des conventions, l’avenir individuel et collectif dans un monde aux échos de chaos) qui porte néanmoins aussi en lui l’évanescence ("désolé, je peux pas laisser ma pote avec un mec qu’elle connait pas"), l’autodestruction, l’annihilation. Car il y a un après, un ailleurs, une réalité mélancolique que l’aube ramène inévitablement à la surface.

Cet "after" s’incarne avec Félicie (Louise Chevillotte) et Saïd (Majd Mastoura). La première est avocate pénaliste, le second chauffeur Uber. Ils se rencontrent sur le dancefloor, se plaisent et s’extirpent de la fête dans le courant de la nuit pour rallier l’appartement de Félicie. Là, ils vont surtout parler, en miroir de cette génération sous perfusion de son à la croisée des chemins entre la capitulation ("c’est toujours la même chose, les gens sont morts défoncés, tes potes sont scandaleux, il faut les gérer", "tu croises plein de gens avec qui tu partages plein de trucs, mais tu ne te rappelles de rien. L’énergie dont tu parles, elle est trop volatile, elle existe pas", "ça ne sert à rien de se battre parce qu’on est déjà battus, "l’humain est structurellement mauvais, on tend vers la facilité, donc vers le pire. Regarde le progrès : l’humanité n’a jamais été aussi riche et aussi avancée, on détruit tout ce qu’on touche") et des bribes d’espérance révolutionnaires ("vu que tu kiffes la même chose avec les gens, il y a un truc qui se passe, t’es surpuissant, t’es pas seul"). Une discussion existentialiste, écologique, politique (naufragés ou résistants de l’intérieur ?) qui se terminera en étreinte douce, tandis que la fête se poursuit en parallèle avant que le jour livide ne se lève au centre de Paris au son d’une rébellion agitant le pavé.

Balançant entre captation documentaire (la fête) particulièrement réussie, électrisante au rythme des morceaux remixés par Panzer, et contrepoint de fiction sous-tendue d’idéologie et de ressenti du parisien contemporain dans un rythme totalement différent, After se révèle un film-expérience séduisant dans sa modestie naturaliste échappant à la narration traditionnelle sans intention d’en surjouer. Un entre-deux qui a son charme, un underground qui a ses codes, une jeunesse qui n’en pense pas moins…

Produit par Société Acéphale (qui gère aussi les ventes internationales) et par Salt for Sugar Films, After a été coproduit par Les films de l’autre cougar et Les productions du Mont Pelat.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy